TROPISME

mer. 07 janv. de 18h00 à 22h00

Damsels Without Stress

projection du film de Cédrick Eymenier

Je découvre les Cévennes à l’âge de 20 ans en pensant arpenter une véritable forêt primaire. Pourtant les arbres de la forêt du massif de l’Aigoual, parc national des Cévennes depuis 1970, ont été plantés par Georges Fabre, naturaliste nîmois, vers 1900. Cette prise de conscience a changé mon rapport à ce que l’on nomme « la nature ». À cette époque, dans les années 1990, je photographie et filme plutôt le milieu urbain, et m’intéresse notamment à comment le végétal est précisément délimité dans l’espace public. Cette forêt, tout à coup, rejoignait le statut de nature plantée, tel un rond-point végétalisé à l’entrée des villes.

Le ruisseau du Lingas, je l’ai tout de suite aimé. Y aller est devenu une sorte de rituel, au fil des années, en toutes saisons. En 2002, je déménage à Paris, voyage de Tokyo à Chicago, et réalise une série de films tournés dans les rues de ces mégapoles. En 2009, retour dans le sud de la France, les Cévennes deviennent le lieu exclusif des vacances d’été. C’est à ce moment que je commence une collection d’ailes de libellules bleues.

J’ai exposé ces ailes à la galerie Aperto, à Montpellier, en 2018, accompagnées d’un premier film sur une libellule tigrée. Le carton d’invitation présentait le collage d’une libellule verte écrasée sur un trottoir, photographiée dans les rues de Nîmes le 4 mai 2018, et d’un haïku de Taneda Santôka « Sur une pierre la libellule rêve en plein jour » photographié le lendemain, telle une étrange coïncidence.

Est-ce les ailes de libellules trouvées dans la rivière ou leurs envolées qui m’ont d’abord attiré ? J’ai remonté beaucoup de rivières et de ruisseaux, lentement. Lorsqu’on trouve une aile de libellule, on a de fortes chances de trouver les trois autres pas loin. Je photographie et filme mes explorations. Pour le projet de film Damsels Without Stress, j’ai choisi un lieu de tournage parmi les rivières des Cévennes que je connais, le ruisseau du Lingas étant mon favori. Merveilleux, on peut facilement l’enjamber, il y a de part et d’autre, la tourbière, beaucoup d’arbres, buissons, plantes, vivants ou morts le bordent. On y trouve des recoins sombres remplis de racines, et quand on s’approche, ce petit espace devient immense, ça grouille de vie, à une échelle qui reste observable à l’œil nu.

Observer longtemps, attendre, peut facilement nous plonger dans un état de picnolepsie. Comment bascule-t-on de l’attention à l’inattention ? Qu’est-ce qui nous plonge dans cet état ? Qu’est-ce qui nous en tire ?

Le ruisseau du Lingas est à 1 000 m d’altitude et est assez peu visité. Les libellules ne sont pas farouches, elles se posent facilement sur moi, le visage, les avant-bras, le dos et parfois sur la caméra. Leur couleur rappelle les peintures métalliques des voitures, mais leur agilité n’a pas d’égal dans le monde mécanique. La température de l’eau est douce et le léger courant génère une petite musique délicate, comme dans le patio d’un riad.

 

David Coulter m’a envoyé son morceau Longing peu avant l’été 2024. Je connaissais donc la musique lorsque j’ai filmé ces libellules au ruisseau du Lingas, mais je n’étais pas sûr qu’elle pourrait fonctionner avec les images. Très vite, en montant le film, je me suis rendu compte que la profondeur des glissements de tonalité de la musique donnait son rythme au film. La richesse de la palette des timbres et les variations d’intensité dramatique accompagnent l’action minimale du film. La libellule va-t-elle se poser ? À quel moment ? Le temps est suspendu. Elle s’envole.

 

Ce film aurait pu être tourné à l’identique au Mésozoïque. Les libellules ont survécu à ce qui a exterminé leurs cousins dinosaures. Une fougère ouvre le film, ces plantes qui sont apparues sur Terre il y a plus de 300 millions d’années, à peu près à la même période que les libellules. Le temps qui passe n’a aucune emprise sur ces espèces. Des survivantes en somme.

 

— Cédrick Eymenier

 

Merci à Frédérique Bouix, Stéphanie Quillon et Jeff Rian pour leur aide précieuse et relecture.

 

Artiste et musicien, Cédrick Eymenier combine photographies, diaporamas, projections vidéo, collages, textes et environnements sonores.
L’exploration des paysages contemporains est au cœur de ses recherches qui s’attachent aussi à décrire certains processus cognitifs particuliers, à observer comment on observe. Picnolepsie, proprioception, coïncidence, appréhension du temps et de la mécanique céleste, ses films prennent la forme de haïku en ne cherchant pas à proposer de relation de cause à effet, mais plutôt tel des haïkus s'efforcent de simplement juxtaposer les observations.
Ses œuvres figurent dans les collections publiques du FNAC, FRAC PACA, FRAC Rhones Alpes

Musicien, Cédrick Eymenier est membre du groupe Cats Hats Gowns, du duo Becoming (avec James S. Taylor) et se produit en solo sous le nom de endless dj 16:9. En 2009, il co-fonde le label Coriolis Sounds et organise plusieurs évènements dédiés aux musiques électroniques à danser allongé ou dormir debout...


cedrickeymenier.com
coriolissounds.bandcamp.com

 

 

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